Dans notre monde, ultra globalisé, les plus riches et les plus puissants semblent parfois échapper à toutes formes de responsabilités lorsqu’il s’agit de faire du profit. De plus, la surconsommation et l’ultra capitalisme nous amènent à exiger bien plus de la planète que ce qu’elle ne peut en réalité nous offrir. C’est d’ailleurs ce que confirme la théorie du « jour du dépassement » qui correspond à la date de l’année, calculée par l'ONG américaine « Global Footprint Network », à partir de laquelle l’humanité est supposée avoir consommé l’ensemble des ressources que la planète est capable de régénérer en un an. Le constat est sans appel : trop d’entreprises et de multinationales tirent profit de l’exploitation des personnes et de la planète en toute impunité.
Aujourd’hui, on estime à près de 25 millions le nombre de personnes victimes du travail forcé dans le monde1. Une victime sur quatre d’esclavage moderne est un enfant et les femmes sont majoritairement touchées par cette problématique. En tant que consommateurs, nous sommes tous indirectement liés à ces pratiques dans la mesure où il y a de fortes chances que le smartphone que nous utilisons contienne des métaux extraits par des enfants, que les vêtements que nous portons soient les fruits d’un travail précaire ou que le chocolat que nous mangeons ait été fabriqué par des esclaves modernes dont la main d’œuvre est extrêmement peu coûteuse2 .
Tout le monde se souvient de l’effondrement de l’immeuble du Rana Plaza au Bangladesh qui a causé la mort d’un millier de travailleurs du textile en 2013. Plusieurs rapports, dont ceux de l’« Australian Strategic Policy Institute » (ASPI) ou de « Tech Transparency Project » mettent en lumière le fait que près d’une centaine de marques connues dans le monde entier bénéficient de la mise en esclavage des Ouïghours. Les exemples de violations des droits humains par des entreprises connues du grand public ne manquent malheureusement pas. La triste vérité est que nombreux sont les secteurs concernés par ces violations de droits humains et environnementaux : le textile, l’huile de palme, les bananes, le thé, le bois, le café, le chocolat, les minerais, etc.
Les médias sociaux et la communication aidant, ces méthodes sont de plus en plus contestées au sein de l’opinion publique. Grâce aux mobilisation citoyennes et aux actions entreprises par la société civile, le débat sur la responsabilisation de nos entreprises, la lutte contre les violations des droits humains et les normes environnementales arrive petit à petit à l’agenda des politiques publiques aux différents niveaux de pouvoir. Des pistes de solutions voient le jour tant au niveau international, européen que national.
Ces dernières années, plusieurs évènements marquants sont venus exacerber l’urgence d’établir de nouvelles règles législatives pour garantir le respect des normes sociales et environnementales dans le commerce international. D’une part, depuis les débats sur le CETA de 2016, nous observons un changement dans l’approche concernant la révision des accords de libre-échange et d’investissement. D’autre part, les procédures en cours à la Commission et au Parlement européens sur l’installation d’un devoir de vigilance donnent un nouvel espoir aux défenseurs des droits humains et environnementaux. Les négociations multilatérales de l’OMC n’étant, jusqu’à aujourd’hui, pas parvenues à aboutir et les initiatives nationales ayant chacune leurs spécificités propres, il est urgent que l’UE établisse une nouvelle législation en ce sens.
Cette analyse tend à déterminer quelle est la part de responsabilité des consommateurs, des entreprises et des pouvoirs publics dans ces pratiques commerciales débridées et fait un état des lieux des avancées dans le processus législatifs, européen et belge, sur le devoir de vigilance.
Anne LAMBELIN
Thème FWB: « Le progrès social par la stimulation d’initiatives économiques et collectives ».