La Belgique faisait alors partie des douze Etats primo-signataires de la convention. L’Etat belge a ensuite ratifié la convention en 1955. Elle s’applique donc en droit belge depuis maintenant 65 ans. La Convention européenne des droits de l’homme a vu le jour au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, avec une intuition certaine que ce n’est qu’en consolidant « la démocratie et l’État de droit que l’on peut parvenir à la paix et à la stabilité1 ». Cette affirmation se trouve également dans le préambule de la Convention : « les libertés fondamentales constituent les assises mêmes de la justice et de la paix dans le monde 2 ».
Au fil des années, la convention européenne des droits de l’homme a démontré qu’elle était bien plus qu’un traité d’après-guerre permettant la construction du Conseil de l’Europe, elle est la gardienne des valeurs
fondamentales des sociétés européennes : Démocratie, Etat de droit, Liberté et Dignité humaine3. Le préambule évoque directement ce rôle de gardienne, énonçant ainsi un instrument permettant « la sauvegarde et le développement des droits de l’homme et des libertés fondamentales ». La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, qui assure le respect de la Convention, a permis de mettre en exergue ces deux rôles. La « sauvegarde » implique que les droits et libertés énoncés dans la Convention soient garantis en toutes circonstances. Le « développement » permet une évolution et une innovation dans la portée des droits et libertés garanties par la Convention4. Comme le disait la Juge Tulkens lors du soixantième anniversaire de la Convention : « Voilà donc l’intelligence/le génie de la Convention européenne des droits de l’homme, qui a permis à celle-ci d’être (…) un instrument vivant pertinent dans le contexte de nos sociétés contemporaines 5 ». Nous avons donc choisi d’étudier la Convention européenne des droits de l’homme à travers l’évolution que la Cour européenne des droits de l’homme a donné à un droit fondamental. Plus spécifiquement, la présente note aura pour objet de présenter les différentes facettes que recouvre le droit à la vie privée et familiale consacré par l’article 8 de la Convention. Le premier volet sera consacré au droit à la vie privée et familiale et son étendue à travers la jurisprudence de la Cour européenne qui met en exergue les différents aspects que recouvre ce droit (I). Nous analyserons également les balises de contrôle lorsqu’une ingérence est établie à l’encontre de ce droit (II). Une conclusion sera également présentée (III).
2 Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, préambule §5.
3 L- A. SICILIANOS, « La Convention européenne des droits de l’homme a 70 ans : dynamique d’un instrument international unique », Revue trimestrielle
des droits de l’homme n°124/2020, p. 818 à 834.
4 Fr. Tulkens, «Introduction», in Cour européenne des droits de l’homme, Dialogue entre juges. Quelles sont les limites à l’interprétation évolutive de la Convention?, Strasbourg, Conseil de l’Europe, 2011, p. 7
5 ibid., p.8